Exclu – Coubadja Kader : « Le football togolais n’est pas encore sorti de l’auberge »

En exclusivité à Togofootbalmnews, Coubadja Kader est revenu sur l’élimination du Togo pour la CAN 2021 et aussi la voie à suivre pour relever le football togolais. Celui en perdition depuis plus de quatre ans.

Lisez plutôt !

Élimination du Togo pour la CAN 2021. Quelle analyse en faites-vous ?

Les mêmes que celles d’avant. Je ne suis pas étonné, après le match aller en Égypte j’ai su que nos chances sont restreintes. Le pire est que toutes les conditions étaient réunies pour faire un résultat. En face, une formation égyptienne qui était dans une mauvaise passe, manque de confiance, camouflé par leur conservation stérile dû à leurs matchs précédents, si je peux me permettre il y a beaucoup d’incohérences dans la manière et le procédé pour bien traiter le sujet principal de cette rencontre (faire un résultat ) je n’ai pas trop compris le pourquoi après les 25 mn de jeu qui a été bien maîtrisé, la formation togolaise est toujours resté en bloc bas à passer son temps à défendre sachant que les matchs contre les équipes maghrébines se jouent dans les 25 premières minutes.

Après ce moment sans un résultat à leur faveur ça s’énerve, ça se déconcentre et les angles de passes s’ouvrent, en plus qu’on a 1 point, on était dos au mur. Ce match m’a fait rappeler le match à la CAN 2017 contre la Côte d’Ivoire une formation en pleine doute. Et qu’on n’a cru faire un résultat. Bref, ce sont les mêmes problèmes. Les mêmes causes donnent les mêmes résultats. La base est toujours négligée. Au lieu de composer,former et garder une équipe locale et de ne l’avoir renforcé qu’avec quelques professionnels,on forme et on déforme. Du coup l’experience ne joue plus. Nous vivons tous les jours dans le renouvellement non entretenu.

Claude Le Roy est-il le seul responsable de cet échec ?

Non, mais il y a sa part de responsabilité qui a beaucoup pesé dans la balance. Si tu vois le classement africain et mondial des sélections nationales et que des pays comme le Bénin, le Burkina Faso, Madagascar pour ne pas citer que ceux-là avec tout le respect que j’ai pour ces nations ça donne un coup de fouet à sa fierté. 128ème au classement mondial et 33ème au classement africain derrière des pays où à notre époque on jouait contre eux sans aller au mise au vert encore une fois avec tout le respect que j’ai pour ces nations. Je ne vais pas me permettre de juger la personne mais la situation, il faut faire preuve d’humilité, de modestie. Il devrait aussi collaborer avec les entraînemeurs nationaux.

Sans discrimination aucune, c’est parce que Claude Le Roy est un étranger qu’on est hypocrite. Si c était Abalo Dosseh ou un Togolais à sa place, il serait déjà viré.

Qu’est ce qui manque à cette équipe pour être compétitive ?

Le problème est presque généralisé sur tout le continent le manque de conscience nationale en comparaison avec les anciens joueurs des années 72, 80, 90,, 2000. Les joueurs d’aujourd’hui prennent plus de risques pour leurs employeurs à savoir les associations européennes de football que pour leur propre équipe nationale. Par exemple : à la CAN 2017 6 joueurs camerounais importants dont le joueur de Liverpool Joël Matip, avaient renoncé au tournoi pour privilégier leurs clubs. En plus le football africain en particulier c’est physique, technique et spirituel. Il faut faire une place à un leader, j’ai l’impression que le staff est trop au-devant de la scène. On parle plus du staff que les joueurs. Il faut aussi la loyauté,la fidélité et la motivation de tout l’appareil de l’Etat.

Il faut former une équipe locale y faire confiance et travailler avec elle longtemps avec un encadrement à la hauteur de l’entretien d’une équipe nationale,et la renforcer par moment par des professionnels en forme du moment. Que les magouilles silencieuses et l’hypocrisie s’arrêtent.

Quelle est la différence entre votre génération et celle actuelle ?

La différence au fait dénote d’un constat. À notre époque on avait une équipe nationale pas internationale. Malheureusement pas comme aujourd’hui, non seulement notre championnat national avait un niveau élevé et la fédération n’attendait pas une compétition pour nous regrouper. On avait beaucoup de matchs de bons niveaux dans les jambes, on était des vrais compétiteurs avec un bon coach ( Gotlib Göeller). Il lui arrive de nous faire jouer des matchs amicaux à 7 contre 11 contre des bonnes équipes de la première division et on sortait toujours gagnant du match. D’où mon mot de “compétiteur”.

Malheureusement ce n’est pas le cas aujourd’hui. Nombreux sont ceux qui ne sont pas titulaires dans leurs clubs qui sont en manque de temps de jeu. En plus à notre époque on était soucieux d’un profit collectif. Et chaque joueur était placé à son poste de convenance selon sa performance. Et il y avait un soutien de tout un peuple derrière nous malgré les gros soucis ici et là. Aujourd’hui on va dans la précipitation dans un encadrement qu’on refuse de bien organiser. Et absorbés par le goût de la médiatisation des matchs ou des renommés dans les championnats sous d’autres cieux, les jeunes sont vraiment pressés d’arriver à bon port. Ce qui les déroute d’une vision à réalisation durable.

Que faire pour que la sélection nationale retrouve ses lettres de noblesse ?

Je l’avais dit. C’est d’être vraiment un patriote loyal pour un profit collectif pour la gloire de la nation. Il faut commencer par : relever le niveau du championnat, la fédération doit avoir son propre budget, avec un projet à long terme sans oublier les catégories inférieures parce que malheureusement en Afrique on a tendance à croire à un miracle qu’à un projet à long terme et à la vision. Avoir obligatoirement une équipe nationale locale qui doit s’entraîner et compétir en permanence c’est primordial comme à notre époque, la plupart de nos qualifications lors des éliminatoires pour des compétitions internationales sont faites sans les joueurs professionnels (Bachirou, Affo Atty, Abalo etc).

Pour preuve en 1996 on était qualifié pour les Jeux Olympiques avec seulement 2 professionnels. Les médias aussi on leur part de responsabilité, chacun est un chaînon utile à la chaîne, ne pas promouvoir les jeunes talents qui sont pas encore prêts pour s’exprimer avec la première équipe et moins des grandes compétitions. Que chacun fasse son travail dans la loyauté et dans le respect des principes qui régissent les valeurs du football.

Avez vous recommencer à suivre les matchs des Éperviers ?

Je regarde de temps en temps et souvent je ne regarde pas jusqu’à la fin dû à nos stratégies en face des adversaires, en plus souvent je sais à peu près comment ça se fini un match si une équipe n’a pas un fond de jeu. Je suis juste les scores à la fin des rencontres . En plus les 5 premiers résultats des matchs des éperviers depuis deux ans me font grincer les dents. Et aujourd’hui nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge.

Depuis le match des légendes au stade de Kégué, nous n’avons plus vos nouvelles. Quelle est l’actualité de Coubadja Kader ?

C’est vrai qu’avec la pandémie du coronavirus, les activités sportives ont du plomb dans les ailes. Vu la situation sanitaire on a donné congés à nos joueurs de certaines catégories y compris la mienne. Néanmoins je continue par intermittence d’etre émissaire de certaines marques d’une équipe à une autre, d’un continent à un autre. Et je suis dans l’utilité de détection des joueurs pour les proposer à des clubs. Pour le moment la seule activité qui remplit mes journées c’est la première équipe, je veux dire les professionnels de Sochaux.

Votre mot conclusif

Je souhaite que la presse sportive togolaise soit aussi regardante sur les valeurs de nos talents anciens comme nouveaux et qu’elle soit vraiment récompensée, louée après tout le travail consenti pour l’honneur du Togo. Que les championnats reprennent avec un bon encadrement dans les conditions précitées. Que Dieu bénisse mon pays.

 

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